e-Lettre N°2 – CORDEX au CNRM : Bilan et prospective

e-Lettre Climeri-France N°2 - Février 2022

Bilan critique de la phase 1 de CORDEX et plan pour la suite

CORDEX au CNRM : Bilan et prospective

Le Centre national de recherches météorologiques (CNRM) s’est engagé dans CORDEX dès le lancement de l’initiative. En Février 2009, il a ainsi accueilli à Toulouse la réunion du WCRP visant à créer un exercice d’intercomparaison des modèles régionaux de climat en amont du 5ème rapport du GIEC. Il a également co-proposé et co-anime encore aujourd’hui deux initiatives au sein de CORDEX : le domaine Med-CORDEX qui concerne les activités de modélisation régionale sur le domaine Méditerranée et le Flagship Pilot Study (FPS) qui vise à mieux comprendre les interactions aérosol-climat sur la région méditerranéenne (FPS-aerosol).

Le CNRM s’est également impliqué en réalisant de nombreuses simulations climatiques dites d’évaluation (forçage par une réanalyse globale) ou de scénario (forçage par des modèles globaux de climat issus de CMIP5). Ces simulations ont été réalisées avec différents modèles de climat régionaux sur plusieurs domaines d’intérêt de CORDEX à des résolutions spatiales de 150, 50, 12 et 2.5 km. Plus spécifiquement, le modèle global à grille basculée-étirée CNRM-ARPEGE a été utilisé sur les domaines Europe, Afrique et Antarctique (en collaboration avec l’Institut des Géosciences de l’Environnement (IGE) sur ce dernier), différentes versions du modèle régional de climat (RCM en anglais) à aire limitée CNRM-ALADIN ont été utilisées sur les domaines Méditerranée, Europe, Afrique et Amérique du Nord. Une contribution originale a été la mise en oeuvre d’un modèle couplé du système climatique régional (CNRM-RCSM) pour l’étude du climat et de la mer Méditerranée, utilisé aussi dans les FPS-aerosol et FPS-airsea, et représentant à haute résolution toutes les composantes physiques du climat de la région (atmosphère, surfaces et hydrologie continentales, océan, aérosols anthropiques et naturels). Plus récemment, dans le FPS-convection, le CNRM a réalisé des simulations multi-décennales à échelle très fine (2.5km) avec un modèle qui représente explicitement la convection profonde, CNRM-AROME, sur un domaine pan-alpin. Une partie des simulations réalisées est aujourd’hui disponible sur des bases de données ouvertes telles que l’ESGF, la base de données Med-CORDEX, le portail DRIASles futurs du climat, le portail web du Copernicus Climate Change Service ou l’Atlas Interactif du GIEC permettant leur accès libre et le développement de services climatiques. À noter également que le modèle de climat global (GCM en anglais) CNRM-CERFACS-CNRM-CM5 est l’un des plus utilisés comme modèle forceur au sein de l’initiative CORDEX et cela tous domaines confondus.

Outre la contribution à de nombreuses études scientifiques communautaires et multi-modèles, la contribution scientifique spécifique du CNRM s’est focalisée sur plusieurs thèmes portés par l’équipe de modélisation régionale du climat (équipe MOSCA) et souvent en lien avec les programmes scientifiques ChArMEx et HyMeX. Ces thèmes sont :

  • le rôle des aérosols dans le climat de la région Euro-Méditerranéenne,
  • les évènements de précipitations intenses en Méditerranée en automne,
  • la formation des masses d’eau en Méditerranée Nord-Occidentale,
  • l’évolution future de la mer Méditerranée, et en particulier, des canicules océaniques,
  • les inondations en Amérique du Nord,
  • l’évaluation de la valeur ajoutée des modèles de climat à haute résolution,
  • le développement et l’évaluation des modèles couplés régionaux,
  • l’application de correction en ligne des biais systématiques sur la dynamique de grande échelle pour la réalisation de projections futures,
  • les incohérences GCM-RCM.

CORDEX a également été l’occasion de renforcer le lien avec plusieurs communautés travaillant sur les impacts de la variabilité et du changement climatique, tels que les spécialistes d’hydrologie continentale, des écosystèmes marins, de la production d’énergie photovoltaïque, des bilans de masse de surface des calottes polaires ou de l’enneigement en montagne.

La contribution scientifique du CNRM à CORDEX a également permis d’alimenter en littérature récente le premier volet du dernier rapport du GIEC avec 53 articles cités (dont 31 avec un premier ou un deuxième auteur du CNRM) dans 10 chapitres sur les 13 que compte ce rapport et un total de 230 citations.

Finalement, le CNRM est fier d’avoir contribué aux premières phases de l’initiative internationale CORDEX malgré l’important investissement nécessaire en temps, en calcul, en organisation et en énergie de la part des scientifiques du laboratoire. Une réunion de bilan interne a été réalisée en octobre 2021. Elle a permis de mettre en avant plusieurs aspects positifs de cet investissement : la visibilité pour le CNRM, l’intégration dans une communauté internationale active, la possibilité de réaliser des études multi-modèles, la contribution à des ensembles très utilisés, la motivation pour le développement des modèles, la dynamique interne, la contribution au rapport du GIEC et aux services climatiques ainsi que le fait de contribuer à de la science “utile”. Cependant, des aspects plus négatifs ont aussi été identifiés : une débauche importante de moyens pour réaliser les simulations parfois au détriment de la production scientifique propre au CNRM, une mise en ligne compliquée sur l’ESGF, certaines simulations inutilisées, une dynamique inégale suivant les initiatives, un travail parfois en silo dans chaque domaine. Le bilan de cette première phase va permettre d’orienter au mieux la contribution du CNRM dans la nouvelle phase de CORDEX qui s’ouvre.

Pour le CNRM, cette nouvelle phase comprendra a minima la participation au FPS-URB-RCC traitant des liens entre l’environnement urbain et le changement climatique, ainsi que des simulations climatiques à haute, voire très haute résolution sur les domaines Europe et Méditerranée, forcées aux bords par la nouvelle réanalyse ERA5 et par certains modèles globaux de CMIP6. Le CNRM s’impliquera dans les thèmes suivants:

  • mise en place de matrices GCMxRCM mieux pensées,
  • amélioration de la cohérence GCM-RCM à grande échelle,
  • représentation des aérosols dans les RCMs,
  • amélioration et explicitation des pratiques de calibration,
  • modélisation du climat régional à local aux échelles kilométriques,
  • modélisation couplée et à haute résolution du système Terre régional,
  • développement de méthodes de descente d’échelle hybride mixant modèle physique et apprentissage machine,

… le tout au service des thématiques scientifiques de la communauté et du laboratoire.

Rédacteurs :
S. Somot, A. Alias, J. Beaumet, E. Brisson, C. Caillaud, L. Corre, M. Déqué, A. Doury, T. Drugé, C. Dubois, Q. Fumière, N. Gonzalez, A. Lemonsu, P. Lucas-Picher, M. Mallet, P. Nabat, S. Planton, F. Sevault, R. Waldman - CNRM (Centre National de Recherches Météorologiques), Université de Toulouse, Météo-France, CNRS

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